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Si tous les commissaires ont réussi leur audition, l’écrasante majorité penche à droite : la faute à qui ?

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Blog du 9 février 2010. Accrochez-vous, je suis à Strasbourg. Sans conviction, mais aussi sans surprise, nous avons voté ce matin la mise en place de la nouvelle Commission européenne. Vingt sept nouveaux commissaires sous la houlette de José Manuel Barroso déjà bien connu dans la maison. Pourquoi sans conviction ? Parce que si tous les commissaires ont réussi leur audition (avec une belle courbe de Gauss, certains de justesse, d’autres avec brio, au milieu beaucoup avec des résultats honnêtes), l’écrasante majorité penche à droite. La faute à qui ? La faute aux élections nationales qui dans les 27 pays de l’Union ont porté la droite au pouvoir. D’où seulement 7 commissaires socialistes, aucun vert, et le reste, centre ou droite. Donc, un rejet de la Commission actuelle n’aurait en rien changé la donne politique : les pays concernés nous auraient produit une copie conforme en cas de rejet de leur poulain; les noms auraient changé, pas le pays ni l’appartenance politique. Mais il faut savoir parfois changer de poulain : la Bulgare Jeleva en a été l’éclatante démonstration. Son audition avait été navrante et la candidate avait fait preuve d’une ignorance sidérale. Elle fut vite remplacée par une autre commissaire désignée, bulgare elle aussi, de droite elle aussi, mais époustouflante et ce qui ne gâte rien, pleine d’humour. Accessoirement vice-présidente de la Banque mondiale, ce qui pour une future commissaire à l’aide humanitaire, était un bon tremplin. Avec ce léger toilettage, la commission était prête.

Donc le vote favorable a rencontré une écrasante majorité. Cohn Bendit, éternel opposant, s’est opposé. Rien d’inattendu. Mais il s’est lancé dans une casuistique subtile. Avec de splendides effets de manche, il a voté non à la Commission, tout en se déclarant prêt à la soutenir si elle œuvrait dans la bonne direction : en déployant une politique fiscale, en renforçant les efforts de lutte contre le changement climatique (à propos, un petit réchauffement ces jours-ci ne me déplairait pas !), en créant de l’emploi etc. Nous, les socialistes, avons dit oui mais en exigeant, en contre partie, du social, de l’emploi et l’étude a priori, avant toute décision législative, de l’impact social qu’elle risque d’avoir. La crise a plané sur toutes les interventions des groupes politiques. Il n’y a pas que Reynders qui joue au caméléon : Daul, le président du grand groupe du parti populaire européen y est allé de son couplet social et Verhofstadt, président du groupe libéral au Parlement européen, n’était pas mal du tout. C’est assez drôle d’ailleurs de se retrouver entre Belges au Parlement européen, avec Jean-Luc Dehaene (très distant), Guy Verhofstadt (drôle et bourré d’intelligence), Louis Michel (avec un potentiel d’indignation intact), Marianne Thyssen (effacée mais gentille), l’extrême droite flamande (bien propres sur eux, BCBG, ignobles), Frida Brepoels du NVA (chaleureuse et « humanitaire »), et puis beaucoup d’autres, Kathleen, Saïd, Isabelle, Marc, Fred etc.. Nous vivons ensemble dans un microcosme où les jeux politiques ne sont pas la transposition des jeux nationaux. Ce sont donc surtout les individualités et les caractères qui priment.

On vote aussi durant cette session sur l’accord SWIFT. C’est-à-dire un accord intérimaire de transmission des données bancaires aux Etats-Unis, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Initialement le réseau SWIFT est une coopérative d’origine belge qui sert de messagerie bancaire reliant près de 8.000 établissements financiers dans le monde. Les Etats-Unis ont utilisé ces données bancaires en réquisitionnant la copie des messages stockée aux Etats-Unis comme back-up de l’original stocké en Europe. L’affaire avait suscité un certain émoi, à cause de son manque de transparence (des messages étaient utilisés sans que leurs auteurs en aient connaissance et sans leur consentement) mais un accord intérimaire avait été consenti aux Etats-Unis les autorisant à continuer la consultation des données durant 9 mois, le temps de boucler un accord final plus soucieux du respect des libertés individuelles. Mais ne soyons pas naïfs, SWIFT ne fait pas que miner les libertés individuelles; il peut aussi être une arme d’espionnage économique. Etonnamment durant ces 9 mois, les inquiétudes du Parlement européen n’ont pas été prises en compte. Il a compté pour du beurre. Or aujourd’hui avec le Traité de Lisbonne le Parlement a un pouvoir de co-décision sur la négociation. Il faut son approbation sur un accord final. Les socialistes, les verts, la gauche unie, et les libéraux risquent de s’opposer. Les Etats-Unis sont furieux, Hillary Clinton téléphone à tous les numéros qu’elle a, dont celui de lady Ashton, nous sommes mis sous pression par les ambassadeurs américains dans différents pays. C’était le gros thème de discussion au Groupe ce soir : c’est clair, les socialistes continueront à dire non. C’est un peu de notre rêve américain qui se brise. La lune de miel avec Obama est terminée.

Et puis, de nombreuses réunions ont préparé le départ de la semaine prochaine en Colombie. Je n’ai déjà que trop parlé du problème colombien mais cette fois, c’est fait : on part. En groupe de «haut niveau» (et oui, c’est ainsi qu’on s’appelle quand le chef du Groupe part avec nous). Vous aurez au retour le détail de cette aventure. D’ici là, beaucoup d’eau coulera encore sous le pont.


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